N°15 du 13 septembre 

 

Les circonstances, quotidiennes ou exceptionnelles, sont toujours pour nous une sorte d’invitation, de prélude, de moment favorable qui interpelle, pour risquer à nouveau notre oui à la réalité, oui à notre vie et à celle des autres.

Dieu n’est jamais indifférent, lointain, passif, devant la souffrance des hommes ; il est attentif à leurs débordements de joie, leurs amours, leurs difficultés, leurs immenses lassitudes et leurs immenses aspirations… Il veut prendre chair en nous pour cela, justement, pour que nous engagions librement notre vie entière dans nos actes, pas seulement une idée de nous-même, ni une apparence de nous-même.

Dans une lettre récente du pape sur le rôle de la littérature dans la formation[i], à laquelle j’emprunte le titre de cet éditorial, il est question de la rencontre avec le Christ « fait chair, fait homme, fait histoire »… « cette chair faite de passion, d’émotions, de sentiments, de récits concrets, de mains qui touchent et guérissent, de regards qui libèrent et encouragent, d’hospitalité, de pardon, d’indignation, de courage, d’intrépidité : en un mot, d’amour. »

Rien d’humain ne saurait être étranger à la mission admirable confiée aux apôtres, de donner à voir et à écouter le Christ Sauveur.

Je suis entrainé, presque malgré moi-même, à entendre la musique de l’amour, à chaque moment et dans chaque circonstance. Si j’écoute, si je veux voir, je me rapproche de l’invisible, et je suis poussé à m’ouvrir à l’amour, c’est-à-dire à ne plus me considérer comme un centre, ou comme un solitaire, mais un sujet libre capable de dire « je » et de recevoir l’altérité (inaltérable !) du frère, de la sœur, appelés comme moi sur la route ; et je les découvrirai progressivement comme des compagnons, des convives et des messagers de joie.

Abandonneras-tu ta surdité à la vie, cette vie toujours communautaire ? Te laisseras-tu heureusement ressaisir par la joie, en frère et en démuni, engagé dans un compagnonnage fraternel sur la route ?

+ Benoît RIVIÈRE

 

[i] 17 juillet 2024